Il me semble que l'heure n'est plus à la curée dans l'affaire DSK (1), car si la cause semble entendue, les attendus de l'acte d'accusation posent une autre question, d'ordre médical et scientifique, à propos d'une telle perte de contrôle de la part d'un homme à qui le pouvoir semblait offert.
Peu importe au fond que l'hypothèse du complot (le "pot de miel") soit un jour vérifiée, le patron du FMI a manifestement brutalement perdu tout discernement, toute inhibition.
J'ai déjà évoqué le phénomène de dépendance à propos de l'opium (Chimies - IX) et parlé brièvement ailleurs de la chimie du cerveau (j’y reviendrai).
Dans les publications concernant les addictions - y compris les addictions sexuelles - on évoque généralement un trouble majeur du circuit de la « récompense ».
J’ai déjà évoqué sur ce site, décrit les principaux neurotransmetteurs, dont la dopamine. J’ai également évoqué le rôle des endorphines.
Quelle est l'action des endorphines ? (voir aussi sur le site)
Les endorphines, comme tous les dérivés et substances proches dans leur action de la morphine, ont pour effet de diminuer l'activité cérébrale et la perception de l'environnement et donc de diminuer la perception de la douleur.
Les endorphines exercent en particulier une action dopaminergique sur les neurones de l'Aire Tegmentale Ventrale et le noyau Accumbens. Ces régions du cerveau, interconnectées entre elles, forment ce que l'on appelle le "circuit de la récompense" (il s’agit de "récompenser" l'exécution des fonctions vitales par une sensation agréable). Le neurotransmetteur qui assure la connexion entre les deux régions de ce circuit est la dopamine.
Les effets du stress sont aussi souvent évoqués dans les cas d'addiction :
"Les études à l'aide de modèles animaux d'addiction ont permis non seulement de mettre en évidence des phénomènes de dysrégulations neurobiologiques spécifiques (dopamine, glutamate, peptides opioïdes, GABA) impliquant le circuit de récompense mais également de montrer que les voies du stress jouaient un rôle important notamment dans l'installation de l'état motivationnel négatif sous-tendant les processus addictifs "
Voir aussi ICI cet excellent article à propos du stress.
Evidemment l'addiction sans substance exogène pose des problèmes particuliers qui sont loin d'être résolus. Sur ce sujet lire :
Behavioral Addictions: Do They Exist ? , (Science, 2001)
Addiction sans drogue(s) , Marc Valleur, Dan Velea (Thema, 2002)
The Neurobiology of Love, Tobias Esch1, & George B. Stefano, (Neuroendocrinology Letters, 2005)
(1) Cette affaire donne à nouveau des media français une image peu reluisante. Après avoir complaisamment occulté les frasques de DSK quand celui-ci était proche des pouvoirs, les voici sonnant l'hallali, images sordides et témoignages circonstanciés à l'appui.
Au delà du manque de professionnalisme, j'appelle cela de la lâcheté, de la veulerie, de la servilité...